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Tabagisme passif : les animaux aussi sont impactés

Temps de lecture : 6 min
Décoration d'un chien qui fume
© Skitterphoto / Pexels

« Fumer nuit gravement à votre santé et à celle de votre entourage », animaux compris.

Les animaux de compagnie plus vulnérables aux dangers de la cigarette 🚬

Les animaux de compagnie sont souvent oubliés parmi les individus exposés à la fumée de cigarette. Pourtant, ils en sont tout aussi affectés.

Pour rappel, la fumée de cigarette contient près de 4 000 substances différentes et plus de 40 sont considérées comme cancérigènes. Les résidus de fumée se dispersent dans l’air et se déposent sur toutes les surfaces.

Cette fumée représente donc un facteur de risque aussi bien pour la santé des humains que pour celle des animaux. Et bien que ces derniers ne sont pas présents au moment où la cigarette est fumée, ils peuvent inhaler les résidus toxiques en suspension dans l’air à chaque fois qu’ils respirent ou au contact des surfaces contaminées (comme les vêtements, textiles, meubles, murs, etc.), ou encore les ingérer quand ils nettoient leur pelage – notamment les chats qui se toilettent plusieurs fois par jour, ou bien même avaler les cigarettes et mégots par accident.

Les poissons d’aquarium sont également sensibles à la toxicité du tabac, comme l’indique la vétérinaire Bénédicte Hévin dans un article consacré au danger de la cigarette sur les animaux de compagnie. « Leur milieu peut être contaminé à partir de la fumée et des résidus présents dans l’environnement, ou bien l’eau peut être souillée lorsque le fumeur plonge ses doigts imprégnés de tabac dans l’aquarium« .

« Les chats sont encore plus affectés. »

Victoria Smith, chercheuse vétérinaire

De manière générale, les animaux sont plus vulnérables au tabagisme passif que les humains. Brigitte Henriquez, professeure en toxicologie à l’École Vétérinaire de Maisons-Alfort, explique pour le Huffington Post, qu' »en ayant une fréquence respiratoire plus élevée que celle de l’homme, l’animal ingurgite encore plus rapidement et en plus grande quantité le gaz toxique de la fumée. » Et il serait probable que les animaux de petits gabarits (oiseaux, chiots, chatons, etc.) y soient encore plus sensibles.

Dans un communiqué (en anglais) relevant les premiers résultats d’une étude menée en 2015, la chercheuse vétérinaire Victoria Smith indique de son côté que « les chats sont encore plus affectés. Cela pourrait être dû au fait que les chats se toilettent beaucoup, ce qui augmenterait la quantité de fumée absorbée par le corps.« 

Des maladies et pathologies spécifiques 🩹

Tout comme nous, au contact répété du tabac et de sa fumée, nos compagnons à quatre pattes ont des risques de développer des maladies et autres pathologies qui peuvent différer de celles des humains.

Brigitte Henriquez indique que « les études ont montré qu’il y avait d’une part un risque pour l’animal [exposé à la fumée de cigarette] de développer un cancer de la cavité nasale ou de lymphome – et non pas un cancer pulmonaire comme cela est très fréquent chez l’homme -, et d’autre part un risque plus élevé d’atopies, c’est-à-dire d’allergies cutanées« . Il a également plus de risques de développer d’autres formes d’allergies et des problèmes respiratoires tels que des bronchites.

Plus précisément, pour ce qui est des chats, ils présentent deux à trois fois plus de risques de développer un lymphome (en anglais) s’ils vivent avec un fumeur. Quant aux chiens, ceux à museau long ont un risque de développer un cancer du museau multiplié par deux et demie (en anglais) et ceux à face courte sont prédisposés aux tumeurs pulmonaires.

« On ne peut pas parler de guérison, mais de guérison transitoire, car il est assez rare de se débarrasser du cancer.« 

Jérémy Béguin, médecin en cancérologie à l’École nationale vétérinaire d’Alfort

Ce n’est pas tout, en plus d’une augmentation des risques de cancers, Clare Knottenbelt, professeur de médecine et d’oncologie à l’Institut Vétérinaire de l’Université de Glasgow qui a mené l’étude publiée en 2015 citée précédemment, explique que « [la fumée] risque de provoquer des lésions cellulaires permanentes [et] d’augmenter la prise de poids après la castration […] ». Ce dernier point est d’autant plus significatif pour les chiens castrés.

Or, comme l’explique pour Slate Jérémy Béguin, médecin chargé des consultations en cancérologie à l’École nationale vétérinaire d’Alfort, pour ce qui est de la médecine vétérinaire « on ne peut pas parler de guérison, mais de guérison transitoire, car il est assez rare de se débarrasser du cancer. On arrive parfois à diminuer les signes cliniques, à améliorer la qualité de vie et le confort de l’animal, mais on n’arrivera pas à guérir de la maladie et l’animal va très probablement décéder.« 

Enfin, bien que cette situation soit rare, l’ingestion de mégots et dérivés du tabac représente un danger de mort. Elle peut entraîner des troubles digestifs, des anomalies cardiaques et respiratoires, voire un empoisonnement à la nicotine.

Selon le Centre Antipoison Animal de l’Ouest (CAPAE), les signes d’une intoxication se révèlent dans l’heure qui suit :

  • salivation excessive ;
  • vomissements et diarrhée ;
  • et parfois incontinence urinaire.

Si la dose est très importante, d’autres symptômes peuvent apparaître :

  • agitation anormale ou à l’inverse, prostration ou affaiblissement sévère ;
  • pertes d’équilibre ;
  • tremblements, voire convulsions ;
  • tachycardie ;
  • abattement parfois jusqu’au coma.

Jérémy Béguin ajoute également qu’il faut veiller aux intoxications avec les drogues qui se fument, comme le cannabis, pouvant provoquer des troubles comportementaux et neurologiques. L’American Society for Prevention of Cruelty to Animals (ASPCA) a d’ailleurs établit que le cannabis est dangereux pour les chiens, chats et chevaux.

🚨 Si votre animal s’est intoxiqué au tabac ou à la nicotine, emmenez-le de toute urgence chez votre vétérinaire.

Peu de preuves scientifiques et de communication sur le sujet 💬

Malheureusement, les études manquent pour quantifier le lien entre tabagisme passif et santé des animaux. Et elles sont d’autant plus rares pour ce qui est de la santé des nouveaux animaux de compagnie (rongeurs, oiseaux, batraciens, reptiles, poissons, etc.).

Jérémy Béguin explique ce premier point par le fait qu’elles sont difficiles à mettre en place : « D’abord, en médecine vétérinaire, il faut un nombre de participants incroyablement important pour arriver à démontrer les choses. Le deuxième problème, c’est qu’il y a souvent beaucoup de liens de causalité qui se mélangent et vous avez donc plein de possibilités de causalité sans vraiment en identifier une en particulier. »

Il ajoute cependant que, certes, ces preuves entre cancer des animaux et tabagisme passif existent, mais elles restent faibles.

« Il y a tellement de choses à aborder lors des visites de prévention qu’on ne communique pas toujours là-dessus. »

Jérémy Béguin, médecin en cancérologie à l’École nationale vétérinaire d’Alfort

La quantité limitée de preuves expliquerait en partie le fait que peu de conseils et recommandations soient portés à la connaissance des fumeurs et fumeuses vivant avec un animal. Comme le relève le vétérinaire : « On n’a pas forcément de quoi leur dire que leur tabagisme peut avoir un lien direct avec leur animal. Et puis, il y a tellement de choses à aborder lors des visites de prévention qu’on ne communique pas toujours là-dessus« . Ceci étant dit, cela n’empêche pas de prendre des précautions.

Les gestes pour épargner son petit compagnon… 😷

Par réflexe, on aurait tendance à fumer dans une autre pièce, près d’une fenêtre ouverte ou encore sous la hotte. Mais ces dispositions ne suffisent pas, car elles ne permettent pas d’échapper aux substances toxiques. En effet, la fumée de tabac s’infiltre dans les moindres recoins : les conduits de ventilation, les prises électriques et même les seuils de porte.

La solution ?

On ne va pas y aller par quatre chemins : arrêter de fumer. Si cela vous semble impossible, du moins pour le moment, il est bien sûr recommandé de diminuer sa consommation ou encore de fumer à l’extérieur, assez éloigné de l’habitat, des animaux et d’autres personnes. Si cela n’est pas possible non plus, fumez alors à la fenêtre et pensez à aérer très fréquemment votre logement afin d’évacuer les polluants et de faire circuler l’air.

Ayez également le réflexe de toujours vous laver les mains après avoir fumé, avant de caresser votre animal, de nettoyer l’aquarium ou tout objet en contact avec votre compagnon.

Gardez vos cigarettes, cigarettes électroniques et leurs liquides, cigares, patchs ou gommes à mâcher de nicotine dans un endroit hors de portée de vos animaux. Videz vos cendriers après chaque utilisation en jetant vos mégots dans une poubelle bien fermée afin que vos animaux ne puissent pas y avoir accès.

Nettoyez plus fréquemment votre logement et ses différentes surfaces, en n’oubliant pas les tapis et les rideaux.

Concernant votre chat ou votre chien, brossez son poil pour retirer celui potentiellement contaminé. Jérémy Béguin recommande « de faire des suivis ou des bilans de santé réguliers chez le vétérinaire » afin de diagnostiquer au plus tôt et avoir plus « de chances d’allonger la durée de vie, avec des prises en charge généralement moins invasives« .

Qu’en est-il de la cigarette électronique ?

Au contraire des cigarettes traditionnelles, les e-cigarettes n’émettent pas de monoxyde de carbone ni de taux importants d’agents cancérigènes. Cependant, elles représentent toujours un risque pour l’entourage, et donc pour l’animal, du fait de la nicotine qu’elle contient. Toutefois, aucune étude n’a, à ce jour, permis d’établir les effets sur les proches après inhalation des substances contenues dans la cigarette électronique.

… et les autres animaux ! 🚭

L’on retrouve très souvent des mégots dans les parcs, les rues, les forêts, les plages, etc. Or, les animaux liminaires et les animaux sauvages sont également victimes de la toxicité du tabac. On pense notamment aux oiseaux, rongeurs, poissons, etc.

Les mégots jetés par terre peuvent être ingérés et provoquer la mort si la quantité est trop importante. Et parfois, ils se retrouvent dans un cours d’eau, parfois jusqu’en mer, et contaminent alors l’environnement des animaux aquatiques qui peuvent également les avaler.

Pour éviter de leur nuire, jetez vos mégots dans une poubelle (après l’avoir éteinte, on s’entend) ou, s’il n’y en a pas à l’horizon, conservez-les dans un cendrier de poche.

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